Boutique de Mrs Bloomsbury

Théodora s'était levée tôt pour ranger la boutique avant l'arrivée de ses premiers clients, et surtout, clientes. Sa patronne, elle, préférait rester au lit. C'était une des rares commerçantes qui était arrivée à se faire une place dans la bourgeoisie, en hissant les vêtements qui sortaient de son atelier parmi les "must have" des élégantes du tout Londres. Elle avait travaillé dur pour ça, et maintenant, elle laissait les autres s'échiner à sa place, se contentant de surveiller le travail.

Après s'être débarbouillée rapidement dans sa petite chambre, elle s'habilla et dévala les marches qui menaient au magasin. Une boutique élégante, faite de boiseries sombres et intimes, avec des canapés confortables et des mannequins portant les dernières créations de sa patronne. Elle se glissa derrière le comptoir et se mit à trier les échantillons de dentelles et de rubans qui s'amoncelaient dans une boîte à chapeau recouverte de tissu. Elle fredonnait doucement, se réjouissant à l'idée que ce soir, après son travail, son frère avait promis de l'emmener voir un spectacle de magie.

Nyme n’avait aucun patient ce matin là et avait par conséquent décidé de régler un détail qui trainait en longueur depuis longtemps. Il sorti de chez lui, un paquet soigneusement enveloppé sous le bras et se fit conduire jusqu’à la petite boutique. Cette fois, il n’avait pas besoin de se déguiser et était donc vêtu avec soin. Il entra mais ne vit personne dans l’immédiat. S’approchant du comptoir, il aperçu enfin une jeune fille qui semblait occupé. Par politesse, il retira son chapeau avant de lui adresser la parole.

- Mademoiselle, j’ignore si je suis au bon endroit mais on a m’a dit que je pourrais trouver ici d’excellentes couturières.

Après tout, il ne venait pas vraiment acheter et ignorait si quelqu’un serait en mesure de faire ce qu’il voulait. Nyme regarda la jeune fille un instant et eu une vague impression de déjà vu, il ne se doutait pas qu’elle était la sœur de l’homme qui l’avait aidé quelque temps auparavant.

- J’ai avec moi un vêtement qui a une grande valeur mais qui se trouve malheureusement un peu endommagé.

Et jamais il n’aurait confié cette robe à quelqu’un d’incompétent. Après tout, il s’agissait de la robe de marié de sa mère, de celle que sa fiancée était sur le point d’utiliser avant que son père n’intervienne et empêche le mariage.

La jeune fille accueillit ce nouveau client avec un sourire aimable et chaleureux. Sa robe était simple, d'un tissu modeste à petites fleurs, mais de bonne coupe. Ses longues boucles brunes étaient retenues par un long ruban assorti à sa robe.

"Bonjour et bienvenue à la boutique de Mrs Bloomsbury!"

Elle écouta patiemment la demande du jeune homme, avant de déplier avec soin le paquet qu'il venait de déposer sur le comptoir. Tout en défaisant les ficelles, elle leva les yeux vers Nyme.

" Je suis certaine que nous pourrons arranger ce qui est arrivé à votre vêtement, nous avons d'excellentes couturières, sans doute les meilleures de Londres!"

Elle sourit avec douceur, puis son regard se posa sur le mystérieux paquet enfin déballé. Elle ne put se retenir de pousser une exclamation de surprise en voyant la magnifique robe qui était devant elle.

"Quel est le problème, et qu'aimeriez-vous que nous fassions?"

Nyme ne se trouvait pas trop dans son élément et ne savait trop ce qu’il était sensé dire. Après tout, les tissus et les robes…ce n’était pas du tout son rayon. Il laissa donc Theodora ouvrir le paquet, s’assurant en même temps qu’elle soit délicate avec celui-ci puisqu’il avait beaucoup de valeur à ses yeux et il ne confierait pas la robe à une imprudente.

- Et bien…comme vous pouvez le remarquer, elle est déchirée à quelques endroits et certaines parties semblent se détacher…sans compter la broderie qui se défait…

Il faut dire que cette robe avait du vécu et qu’elle avait été réparée plusieurs fois plus ou moins bien.

- C’est sûrement beaucoup de travail mais si elle pouvait retrouver un état convenable je serais prêt à y mettre le montant qu’il faut.

Pourquoi voulait-il tant réparer cette robe ? Sûrement pour ce qu’elle représentait à ses yeux car il n’avait plus l’intention de tenter de se marier vu le fiasco que son père avait causé. Surtout qu’il était certain que la seule femme qu’il aurait pu épouser et supporter c’était marié avec le duc de…il ne savait plus trop quoi, et avait au moins deux enfants maintenant.

Theodora opérait avec une grande délicatesse, des doigts de fée, alors qu'elle examinait la robe sous toutes les coutures, mais avec le plus grand soin.

Elle fronça les sourcils à plusieurs reprises en constatant les mauvaises retouches à quelques endroits, allant même jusqu'à secouer négativement la tête. Puis lorsqu'elle finit son diagnostic, elle releva la tête, et un doux sourire éclaira à nouveau son visage.

" Cette pauvre robe a été bien maltraitée! Mais je crois pouvoir faire quelque chose pour elle. Donnez-moi une semaine, et je peux vous assurer qu'elle sera comme neuve! Je m'en occuperai comme si c'était la mienne!"

Elle regretta un peu ses paroles hasardeuses, et baissa les yeux en rougissant. Elle n'avait pas l'habitude d'accueillir des clients masculins, et encore moins d'aussi jeunes et d'aussi élégants.

Elle plia soigneusement la robe, qu'elle rangea dans une boîte de carton coloré. Puis elle prit une étiquette, déboucha l'encrier qui était au coin du comptoir, puis leva les yeux et demanda :
" C'est à quel nom je vous prie?"

En la voyant examiner l’apparent gâchis, il eut un peu peur quand il la vit secouer négativement la tête. Mais elle le rassura immédiatement avec un sourire. Nyme se surpris à la comparer à une poupée de porcelaine tant elle semblait délicate et fragile mais peut-être n’était-ce qu’une apparence. Elle déclara alors qu’elle en prendrait soin comme si c’était la sienne, des paroles qui le calmèrent un peu.

- Je vous fais confiance.

Dit-il simplement en continuant à l’observer. En faite, il se surpris à se demander si c’était la façon dont elle rangeait la robe ou elle qu’il regardait.

- Wintercome

Nyme ne donna que son nom de famille. Après tout, il savait bien qu’il était le dernier de cette famille et que personne ne se présenterait avec ce nom. Il se sentait un peu étrange, ne sachant trop comment agir. Theodora n’était pas le genre de femme à qui il avait l’habitude d’adresser la parole et il prit donc la décision de la traiter comme on lui avait appris, poliment, surtout qu’elle semblait déjà plus intéressante que toutes ces autres qu’il devait supporter pendant les fêtes et ce seulement après quelques mots.

Elle pencha la tête vers le comptoir, puis écrivit avec application le nom donné sur l'étiquette, d'une écriture joliment arquée. Elle rangea ensuite le tout sur une étagère derrière elle, avant de se retourner vers lui avec son éternel et lumineux sourire.

"Wintercome... ce nom me dit quelque chose! Vous êtes l'homme qui a soigné mon frère Nathanael l'autre soir, je me trompe? Il m'en a parlé l'autre jour quand il est venu me voir. Ravie de vous rencontrer..."

Nyme ne sut pas trop comment réagir. D’abord, Nathanael avait parlé de lui…donc ça ne le ravissait pas mais d’un autre coté, elle était quand même sa sœur et il avait dû lui donner quelques explications.

- Oui, c’est bien moi, il m’a parlé de vous aussi, brièvement. Ravie de vous rencontrez, il faut dire que je n’aurais jamais pu savoir que vous étiez sa sœur. Vous ne vous ressemblez pas du tout et heureusement je dois dire puisque c’est tout à votre avantage.

Drôle de hasard par contre de tomber sur elle. Il faut croire que cette famille était dans son destin ses derniers temps. Mais était-ce vraiment une mauvaise chose.

- J’espère qu’il va mieux que lors de notre dernière rencontre.

Rajouta-t-il rapidement pour ne pas sembler trop flatteur et rester poli.

Elle ne put retenir un léger rire, ses pommettes se colorant de rouge sous l'effet du compliment.

" Vous êtes méchant! Mon frère est un peu rustre, mais il a un coeur en or. Sans lui, je ne sais pas ce qui aurait pu m'arriver. Je lui serai toujours reconnaissante... Et il avait l'air d'avoir apprécié sa soirée avec vous... Ca l'a changé de l'ordinaire... "

Son visage s'assombrit une seconde avant de retrouver son sourire.

" En tout cas vous vous êtes bien occupé de lui, on ne voit presque plus ses cicatrices! D'habitude c'est moi qu'il vient voir dans ce genre de situations, mais un vrai médecin, c'est quand même autre chose!"

Son intention n’avait pas été d’insulter ou d’être irrespectueux envers le frère de la jeune fille. C’était simplement que Nyme manquait parfois de tact et ne savait pas trop comment formuler ce qu’il voulait dire. L’habitude de rester seul à ne parler qu’à son majordome ça peu affecter la façon de dire les choses de quelqu’un.

- Navré, je ne voulais aucunement manquer de respect à votre frère…j’ai mal formulé ce que je voulais dire.

Heureusement, elle ne sembla pas lui en vouloir pour sa maladresse et retrouva son sourire.

- Et bien, content de le savoir. Sachez que si jamais vous ou votre frère évidemment, aviez besoin d’un médecin n’hésitez pas…si vous pouviez me passer un morceau de papier je vous donnerais l’adresse où vous pourrez me trouver si je n’y suis pas mon majordome vous dira où je me trouve.

Pourquoi faisait-il ça ?...Ce n’était pas du tout dans ses habitudes.

Elle rougit en baissant les yeux, et lui tendit un morceau de papier ainsi qu'un porte-plume. Décidément elle se sentait idiote de réagir comme ça, de toute façon ce jeune homme de bonne famille n'en avait strictement rien à faire d'elle, petite couturière. Néanmoins, il ne la laissait pas indifférente...

" Merci pour votre proposition, c'est très généreux de votre part... C'est vrai que les soins peuvent parfois être hors de prix, mon frère a pu en faire l'expérience avec moi... Mais je ne veux pas que vous vous sentiez obligé de quoi que ce soit envers mon frère, et encore moins envers moi... Vous ne nous devez rien..."

Elle reprit le papier avec son adresse, qu'elle fit disparaître rapidement dans les plis de sa robe, en veillant à ce que personne ne le remarque, avant de faire face à nouveau à son beau visiteur.

" Vous fallait-il autre chose?"

Nyme ne savait pas trop ce qu’il faisait pour la faire rougir mais ne pu que trouver ça adorable. Pourtant il avait vu bien des femmes lui tourner autour car plusieurs familles le considérait comme un bon parti vu sa fortune et la réputation des Wintercome depuis plusieurs générations. Il écrivit son adresse sur un bout de papier et continua à s’étonner.

- Ce n’est pas une question de redevance. Dite-vous que ce n’est que présent, un si charmant minois doit en recevoir plusieurs.

Pourquoi est-ce qu’il disait tout ça ? Bon…il fallait bien qu’il se justifie un peu de lui donner ainsi son adresse. Mais quand elle lui demanda s’il lui fallait autre chose, il se retrouva bien mal pris alors il ne pu que dire la vérité.

- Non…ce sera tout…au plaisir de vous revoir mademoiselle ?

Il pouvait au moins savoir son nom puisqu’elle semblait connaître le sien.

Il vit le visage de Theodora se crisper légèrement, et cette fois-ci, ses pommettes ne se colorèrent pas plus que la normale. Il semblait que la flatterie était allée trop loin. Son frère l'avait bien souvent mise en garde contre les séducteurs, et contre tous les malheurs qu'ils étaient susceptibles d'amener. Et ça, elle se l'était toujours promis.
C'est d'une voix maintenant totalement neutre qu'elle répondit

" Dommage que seule cette partie de ma personne semble intéresser Monsieur... et je mets un point d'honneur à refuser les ''présents" de personnes qui pourraient me le faire regretter."

Elle s'arrêta une seconde avant de reprendre

" Nous vous ferons parvenir un télégramme quand votre robe sera réparée. En attendant, merci d'être venu chez Bloomsbury et bonne journée!"

Elle accompagna ces mots d'un léger sourire poli, avant de baisser les yeux et de recommencer à classer dentelles et rubans sans lui prêter plus d'attention.

Bon…il avait encore dit une idiotie. Son intention n’était pas du tout de la séduire, loin de là puisqu’il avait déjà depuis longtemps écarté les femmes de sa vies mais apparemment elle ne l’avait pas très bien prit. Nyme ne tenta même pas de se rattraper de peur de commettre une autre erreur et d’aggraver la situation…Il tourna les talons, remit son chapeau et sortit dehors pour remonter dans son carrosse. Il n’eut rien à dire pour que le cocher face avancer les chevaux. Dire qu’il ne connaissait même pas son nom…Nyme rentra chez lui.

- Alors, tu as trouvé quelqu’un pour la robe ? Nyme ? Je te parles…

- Et je ne te réponds pas.

- Qu’est-ce que tu as ?

Il ne répondit pas et s’enferma dans son bureau, mettant ses comptes à jour pour se calmer un peu.

Les jours furent très long…il annula tout ses rendez-vous et resta chez lui. Masson tentait de lui parler, de le raisonner un peu puisque normalement quand il décidait de s’isoler ça suffisait à le ramener sur la bonne voie et à retourner travailler mais cette fois ça ne suffisait pas.

- Nyme, tu ne vas pas encore rester enfermer aujourd’hui ?

- Ferme les rideaux…..

- Pourrais-tu au moins me dire ce qui se passe ?

- Je ne sais pas…je n’ai pas envie de tout ça…de voir cette bande de poules sans têtes…et puis je ne sais pas me conduire tu le dis toi-même…

- Bon…ça suffit !

Masson tira les rideaux de la chambre pour laisser le soleil entrer et Nyme se cacha sous ses couvertures que le majordome s’empressa de lui arracher

- Debout ! Arrête d’agir en enfant !

Nyme, un peu frustré de se faire réveiller ainsi, se leva d’un bond et attrapa ses affaires pour s’habiller un peu…négligemment. À quoi bon faire un effort si c’était pour rester chez lui ? Il alla ensuite chercher un livre dans la bibliothèque et alla s’installer dans un fauteuil pour lire. Son majordome l’observa un instant, soupira et retourna à ses occupations.

Theodora retourna au magasin avec le coeur lourd. Cet étrange mais beau jeune homme la préoccupait. Comme pour beaucoup, elle avait envie de l'aider, mais elle savait qu'elle prenait beaucoup de risques en le faisant. L'opinion des autres jouait beaucoup, et puis, voulait-il seulement se faire aider?

Elle replaça consciencieusement l'argent des commandes dans la caisse, tint le registre à jour, puis s'installa devant un mannequin et commença à travailler sur un manteau. Le froissement du tissu sous ses doigts, le va-et-vient de l'aiguille l'occupait et lui permettait de penser à autre chose. Lentement, d'une ébauche de vêtement commença a émerger un splendide manteau en tissu précieux, qu'elle était en train de rehausser de broderies aux boutonnières. Le temps passait rapidement dans l'atelier de la boutique.

Theodora continua son laborieux travail toute l'après-midi, et ce n'est que vers les 18h qu'il vit les lumières du magasin s'éteindre, les vendeuses et les couturières mettre de l'ordre, puis sortir de l'échoppe. Elle échangea quelques mots en riant avec l'une d'elles, avant de lui souhaiter la bonne nuit. Puis elle s'admira une seconde dans la vitrine pour fixer son chapeau à l'aide d'une épingle.

Cependant, elle eût la sensation d'être observée. Elle tourna la tête, et vit un homme se tenant debout près d'elle, en tenue de travail. Elle allait détourner son regard quand elle se concentra un peu plus, et ses yeux s'écarquillèrent de surprise.

"Vous? Mais que faites-vous ici?"

Il la vit sortir, mais attendit que les autres se soient écarter, par contre, elle lui parla avant qu’il n’eut le temps de faire quoique se soit. Apparemment, elle l’avait reconnu.

- Je m’excuse….je ne voulais pas vous effrayer. Je désirais simplement vous parler.

Nyme garda ses distances, ne voulant pas qu’elle se mette encore à s’imaginer un tas de choses absurdes comme se dire qu’il la suivait, surtout déguisé de cette façon.

- Je tenais à éclaircir le petit différent que nous avons eu lors de mon premier passage ici…je crois que vous m’aviez mal compris et je ne veux pas que vous gardiez une telle opinion de moi…ce n’est pas une question d’honneur ou une quelconque absurdité du même type mais simplement que je ne veux pas que vous vous sentiez offensé par ma conduite.

Il avait relevé un peu la tête pour la regarder, espérant que cette fois, malgré sa méthode peu conventionnelle pour les excuses, il n’avait pas fait un faux pas.

Elle l'écouta s'excuser maladroitement, s'imaginant l'effort que cela devait représenter pour lui. Elle ne s'attendait vraiment pas à le trouver devant son travail, mais ce n'était pas si mal. Puis elle plongea ses yeux dans les siens, et lui accorda un sourire plein de douceur et de bienveillance.

" Il n'y a pas de mal... nous nous sommes mal compris j'ai bien l'impression... Et je vous dois aussi des excuses, de m'être emportée comme je l'ai fait... L'honneur et la réputation sont les seules choses de valeur qu'une fille comme moi peut conserver... Et Londres est une ville plein de séducteurs."

Elle attendit une seconde, avant de continuer son discours.

" Mais je ne comprends toujours pas ce que quelqu'un comme vous a à faire de ce que pense ou ressent une fille de ma condition. Je ne suis qu'une simple couturière, et que je sois fâchée ou non n'entravera en rien la marche du monde... alors que cherchez vous?"

- Je ne saurais le dire…mais je crois que tout le monde a le droit au respect. Je sais bien que plusieurs personnes de ma condition ne pensent pas ainsi mais je sais aussi que beaucoup de pauvres gens ont beaucoup plus de valeur que ce qu’on leur accorde.

Un peu malalaise, n’ayant pas l’habitude de s’adresser ainsi à quelqu’un seul à seul, il baissa les yeux pour ne plus avoir à la regarder directement.

- Vous ne devriez pas avoir une si piètre opinion de vous-même mademoiselle, vous avez beaucoup de talent et vous semblez mettre tout votre cœur à votre ouvrage et ce sont là deux merveilleuses qualités que personne ne pourra vous enlever.

Nyme releva la tête, il n’appréciait pas qu’elle se considère ainsi, ce n’était pas en se dévaluant qu’on progressait dans la vie et Theodora avait encore la chance de pouvoir avancer alors que lui restait coincé au même point depuis longtemps…mais avec le mariage envisagé avec il ne savait pas trop laquelle de ces folles…ça serait peut-être un pas de plus mais en avant ou en reculant il ne pourrait pas le dire.

A nouveau les joues de la jeune fille se colorèrent de rouge au propos du jeune homme. Elle n'en croyait pas ses oreilles, un aristocrate qui se souciait du bas peuple, qui en faisait même l'éloge! Décidément, il n'arrêterait pas de la surprendre!

"Eh bien... merci! C'est gentil à vous de me dire ça, et surtout cela me fait très plaisir! D'habitude les clientes ne voient en nous que ce qui leur permettra de briller en société avec une robe plus belle que celle de la voisine...

En tout cas, merci de vous êtes déplacé en personne pour me dire ceci... cela me touche, vraiment. Et permettez-moi aussi de vous souhaiter tous mes voeux de bonheur pour votre mariage... je suis sûre que l'heureuse élue a beaucoup de chance! Je rêverais de me marier dans une aussi belle robe que celle de votre fiancée!"

Nyme eut un sourire, il avait bien agit pour une fois et elle semblait heureuse de ce qu’il disait. Mais quand elle parla de mariage, il s’assombrit de nouveau. Il n’aurait bientôt plus le choix et devrait choisir sa femme et cette fois son père ne serait pas là pour tout gaĉher.

- Oui….j’imagine qu’elle le sera quand j’aurais choisi qui ce sera…sans doute l’une de vos clientes…

Après tout, toutes ces femmes passaient par ici. Sans doute son ancienne fiancée aussi parfois, il ne l’avait jamais revu depuis et c’était sans doute mieux comme ça, le simple fait d’avoir des nouvelles de temps à autre lui suffisait.

- Tout ça devrait être décidé au courant de la semaine…peu importe, ce n’est pas important. Je suis content d’avoir pu régler ce différent et je…je vous souhaite une bonne soirée…vous saluerez votre frère de ma part quand vous le verrez.

Nyme n’avait pas envi de partir, de rentrer chez lui dans cette grande maison qui le déprimait un peu mais au moins il pourrait s’occuper en discutant avec Masson pour tenter de trouver la femme qui l’ennuierait le moins.

Elle fronça légèrement les sourcils en entendant les paroles de son visiteur. Quelle résignation!

"Vous voulez dire... que vous prévoyez de vous marier dans les prochaines semaines mais... vous ne savez pas encore avec qui? C'est une décision trop importante... je veux dire... je pense que l'idée de se marier ne vient qu'après avoir rencontré quelqu'un dont on ne veut plus se séparer!

Je ne veux pas me mêler de vos affaires, loin de moi cette idée .... mais se marier pour se marier n'est pas l'idéal. Se retrouver coincé à vie avec une personne qu'au final on apprécie peu est un des pires calvaires qu'on puisse endurer. Vous êtes jeune, laissez la vie vous surprendre en mettant sur votre route quelqu'un qui pourra éclairer votre vie... ce serait dommage de prendre une décision trop précipitée que vous pourriez regretter... Enfin, c'est ce que je pense..."

Elle avait perdu son calme habituel pour s'enthousiasmer en prononçant ses dernières paroles. Le sujet semblait lui tenir à coeur, et sa passion semblait communicative.

Elle avait de en belles paroles mais Nyme savait que les choses ne pouvaient être ainsi pour lui du moins.

- Les choses ne fonctionnent malheureusement pas ainsi. Je dois choisir pendant que je le peu encore pour que la lignée ne cesse pas d’exister…Pour vous dire vrai je devais me marier il y a quelques années déjà et ce n’était pas qu’un mariage de convenance…mais mon père s’y opposait et à tout fait annuler. Je n’ai pas vraiment le choix…finir seul et voir avec moi s’éteindre une famille et toute son histoire ou me trouver une femme.

C’était un sujet qu’il n’avait jamais aimé abordé mais il se sentait libre d’en parler avec elle. Il savait qu’elle n’avait pas les mêmes idées préconçues que tout les autres d’après ce qu’elle venait de dire et ça le rassurait un peu.

- Les mariages d’affections…pour les gens comme moi, ça ne se trouve que dans les romans j’en ai bien peur. Je sais que ce n’est pas l’idéal…j’ai vu ma mère malheureuse à un point que vous ne pouvez vous imaginer mais…les choses sont ainsi.

Son regard reflétait une profonde tristesse. Les paroles de Nyme lui faisaient mal... rien que pour cela, elle ne regrettait pas d'appartenir à son monde, un monde d'apparences et de convenances, où tout était tracé avant même la naissance. Elle au moins, avait le choix.

" Je ne vous déconseille pas de vous marier, bien au contraire... mais j'ai l'impression que vous avez besoin de quelqu'un qui vous aime et vous comprend. Pas quelqu'un qui partage votre vie parce qu'elle y a été obligée ou par intérêt. Laissez-vous le temps de trouver celle qu'il vous faut! Il n'y a pas de plus mauvaise décision que celle prise dans la précipitation."

Elle plongea son regard noisette dans le sien, plein d'une profonde compassion.