Nathanael se met en chasse

Encore une victime... Encore une des braves filles qu'il connaissait et qui venait de se faire sauvagement assassiner. C'en était trop!
Depuis des semaines les bas quartiers de Londres vivaient dans la peur... plus que la peur... la terreur, même. Depuis des semaines les bas quartiers de Londres étaient hantés par un monstre sanguinaire qui s'attaquait, lui aussi, aux plus faibles.
Des prostituées, des braves filles qui n'avaient pas eu d'autre choix que de prendre cette sombre voie. Des filles qu'il connaissait, avec qui il avait plaisanté, qu'il avait croisées dans un pub. Assez.

Il prit la décision de traîner près de ces filles, pour les protéger, et aussi pour attraper le salaud qui faisait ça.

Il releva le col de son pardessus et disparut dans la brume.

Il se retrouva nez à nez avec un jeune homme habillé convenablement, même si son costume n'était pas très luxueux, et l'air gentil. Pas un de ces mauvais bougres qui sillonnent les rues mal famées. Nathanael se pencha pour aider le petit garçon à se relever, l'épousseta un peu, puis lui sourit avec douceur.

" Eh ben mon bonhomme, faut regarder où tu mets les pieds! Tu t'es pas fait mal j'espère?"

Puis il remarqua la miche de pain à moitié cachée sous la veste du petit, avant d'entendre des pas précipités venir dans leur direction. Après un regard par dessus son épaule, il attrapa la miche de pain qu'il coinça sous son bras, prit le petit par la main, et les deux commencèrent à marcher dans la direction du policier qui fonçait droit vers eux. Contre toute attente, le policier passa à côté d'eux sans les voir, et disparut dans une ruelle adjacente. Après tout, il cherchait un sale morveux, pas un père avec son fils.

Le policier parti, Nathanael fit un clin d'oeil au petit et lui rendit sa miche de pain, lui glissant en plus une pièce dans la main.

" La prochaine fois, tu pourras te l'acheter, ton pain!"

Il était persuadé de c’être fait prendre quand il l’aida à se relever, il eut encore plus peur mais étrangement il lui sourit en lui disant de faire attention. Quand il lui prit son pain, William voulu protester. Après tout, c’était à lui et il en avait besoin pour manger. Mais le policier passa tout prêt et il voulu se sauver mais Nathe le prit par la main en le trainant avec lui. Will cru qu’il allait le conduire au policier et ferma les yeux un moment en attendant le pire mais étrangement, les secondes s’écoulèrent sans que ça ne se produise et Nathanael lui rendit son pain en lui donnant en plus une pièce. Le gamin ne comprenait plus rien. Il se dépêcha de ranger la pièce dans sa poche pour ne pas la perdre et regarda l’homme.

- Merci m’sieur

Dit-il tout simplement d’une petite voix à peine audible avant de se remettre à tousser. Il ne pouvait pas s’en empêcher, il avait toujours mal à la gorge. Surtout après avoir couru comme il venait de la faire il avait du mal à respirer.

- Pourquoi vous lui avez pas dit ?

Nathanael sourit et s'accroupit pour se mettre à la hauteur du petit bonhomme. Il se voyait un peu en lui, roublard malgré lui, et terriblement seul dans ce mon hostile.

" Tu sais... les policiers, je les aime pas beaucoup non plus! Et puis, quand j'avais ton âge, j'étais comme toi... je n'avais plus mes parents alors je devais me débrouiller pour trouver à manger. En plus, je n'étais pas seul, je devais aussi m'occuper de ma petite soeur... Et j'aurai bien aimé qu'on m'aide à cette époque."

Il remarqua, en le regardant de près, que l'enfant n'avais pas l'air en grande forme, en plus d'être maigre. Il allait en toucher un mot à Nyme, peut-être qu'il pourrait l'ausculter à l'occasion.

" Tu es malade? Tu tousses beaucoup je trouve!"

William l’écouta en arrachant un morceau de pain pour manger, ne pouvant résister plus longtemps. Entendre Nathanael lui raconter qu’il avait été un peu comme lui le rassura, il avait peut-être une chance de survivre finalement et de devenir un grand lui aussi. Puis l’homme se mit à s’inquiéter de sa santé. C’est vrai qu’il toussait beaucoup mais il avait l’impression que c’était presque normal.

- Je tousse comme mon papa c’est tout…et j’ai froid aussi mais j’ai mon manteau alors souvent j’ai moins froid.

Dit-il tout simplement en prenant une autre bouchée de pain.

- Mais moi j’ai pas de petite sœur comme ça tout le pain c’est pour moi.

Le gamin n’était pas forcément égoïste, c’était surtout une question de survie. Il avait eu de la chance cette journée là de pouvoir voler ce pain parce que parfois plusieurs jours s’écoulaient avant qu’il ne puisse manger à nouveau parce qu’il ne trouvait rien.

Nathanael rit en lui ébouriffant les cheveux, comprenant bien la réaction du petit garçon.

"Ah ben t'en as de la chance! Moi je devais travailler deux fois plus fort pour ne plus avoir faim!"

Intérieurement, il n'arrivait pas à se faire à l'idée que, dans quelques minutes, il allait se relever et s'éloigner, laissant ce petit garçon au monde de la rue. Cette idée lui trotta en tête, et il eut une idée. Il se releva, puis reprit la main du petit. Il connaissait une vieille dame qui s'occupait d'enfants pour se faire un peu d'argent. Elle était très gentille, et s'occupait bien d'eux. Il allait y emmener le petit, le laissant là-bas pour quelques jours, le temps qu'il se remplume et se soigne... Après, on verrait.

" Alors mon grand, j'ai une idée. Si tu veux, je connais une vieille dame très gentille qui s'occupe des enfants comme toi, qui n'ont plus de parents. Tu pourras y dormir dans un vrai lit, manger à ta faim, et surtout, prendre un bon bain, pendant quelques jours. Alors, qu'est-ce que tu en dis? Ca t'intéresse?"

Dévorant son pain avec appétit, ne prenant pas la peine d’en garder en réserve puisqu’il risquait de se le faire voler, William ne quittait pas Nathanael des yeux. Il lui proposa alors de l’amener chez une vieille dame qui s’occuperait de lui. Mais Will n’était pas idiot, c’était beaucoup trop beau pour ne pas qu’il y ait une attrape. Méfiant, il lâcha la main de l’homme.

- Pourquoi vous faites ça ? Vous êtes fou c’est ça ?

Il ne se laisserait pas avoir. Will avait vu beaucoup d’autres enfants disparaitre du jour au lendemain et surtout qu’il y avait plein de meurtres ces dernier temps dans la ville. Il ne faisait pas tant pour essayer de survivre pour finir par se faire tuer par un cingler.

- Je vais pas avec vous…vous voulez me tuer c’est ça ? Alors vous avez inventé toute une histoire pour ça….

Le gamin s’emporta un peu et se mit à tousser pas mal comme s’il était en train de s’étouffer mais il finit par arrêter.

Nathanael fut d'abord surpris par réaction du petit garçon, et désarçonné par son aplomb, puis éclata de rire en apprenant que le petit le prenait pour un meurtrier. Décidément, ce petit bonhomme lui plaisait de plus en plus!

Est-ce que j'ai une tête à enlever les petits enfants pour les manger? Comme je te l'ai dit, petit j'étais comme toi, et moi je n'ai pas eu la chance qu'on m'aide... Tu sais ce qu'on va faire? Tu me suis jusque devant la porte, et je te laisse regarder l'endroit. Ensuite, si ça te plait, libre à toi d'y rester. Qu'est-ce que tu en dis? Ca te semble honnête?

C'est vrai que lui n'avait pas eu de chance, et si il pouvait faire ne serait-ce qu'un petit geste pour aider ce gamin, il le ferait... Il ne pouvait pas les aider tous, la misère était trop importante dans les rues de Londres, mais il pouvait ajouter sa pierre à l'édifice.

- Il ne faut pas se fier aux apparences.

Lança le gamin quand Nathanael lui demanda s’il avait une tête à enlever des enfants. C’était une leçon qu’il avait bien apprise car son père ne cessait de lui répéter.

- Je ne sais pas…peut-être…d’accord je vous suis mais ne vous avisez pas de vous moquer de moi.

C’est qu’il était très fier ce William. Il n’avait peut-être pas grand-chose mais il tenait beaucoup à ce qu’il avait. Il accepta donc de le suivre. Will avança donc dans les rues en vérifiant plusieurs fois si la pièce était toujours au fond de sa poche car c’était devenu son bien le plus précieux. Il restait par contre méfiant à l’égard de cet homme qu’il trouvait beaucoup trop sympathique et regardait sans arrêt partout autour de lui pour voir par où il pourrait s’échapper si jamais il en avait besoin.

Nathanael comprenait la méfiance du petit garçon, aussi marchait-il à côté de lui, mais à environ un mètre de distance, histoire de lui montrer qu'il lui laissait une issue de secours si le besoin s'en faisait sentir. Ils marchèrent environ dix minutes avant d'arriver devant un immeuble en briques rouges, plutôt bien tenu. Dans la cour devant l'immeuble, deux petits garçons et une petite fille jouaient avec un jeu de quilles en bois. Ils avaient l'air en bonne santé, bien nourris, et surtout, heureux. Ils couraient en riant et en criant, sautant sur place à chaque fois qu'ils en faisaient tomber une. Quand Nathanael fit sonner le heurtoir, une vieille dame à l'air gentil vint lui ouvrir. Elle offrit à l'enfant un sourire accueillant, et il put remarquer que l'intérieur de l'appartement semblait tout à fait normal, avec un bon feu de cheminée.

Nathanael s'adressa à la vieille dame.

Bonjour Mme Jenkins! Je vous le confie pendant quelques jours, le temps qu'il se remplume et surtout, qu'il guérisse sa vilaine toux. Si jamais son état empire, faites-moi prévenir, je connais un médecin qui pourra le soigner...

Puis il se pencha vers le petit garçon.

Alors, qu'est-ce que tu en dis? Tu restes ou tu t'en vas?

William regarda, complètement ébahit, l’endroit où cet homme voulait qu’il demeure. Quand la porte s’ouvrit, il ne pu s’empêcher d’étirer le cou pour voir à l’intérieur. Ce qui ne fit que l’éblouir d’avantage, tout avait l’air tellement bien…c’était vraiment étrange. Le gamin regarda ensuite la vieille dame. Elle semblait gentille, pas du tout la vieille sorcière qu’il s’était imaginé. Pui vin ors la question, est-ce qu’il voulait rester là ?

- Je peux rester ici pour vrai ?

Apparemment, son choix était déjà fiat, il aurait été complètement idiot de refuser. On lui offrait l’occasion d’avoir un toit sur la tête et des repas au moins pour un temps, lui enlevant tout ces soucis des épaules, le laissant enfin vivre comme un enfant devrait pouvoir vivre. Et puis, un bon bain ne lui ferait sûrement pas de mal car il était couvert de poussière de charbon au point qu’on aurait presque pu croire qu’il sortait tout droit d’une mine.

- C’est pas une sorcière qui va me manger ?

Bon, il voulait bien rester mais c’était quand même un détail important à vérifier.

Nathanael sourit en voyant les yeux du gamin se mettre à briller d'envie à la vue du domicile de la vieille dame. Mais il sentit aussi sa gorge se serrer... ce petit gamin était ébahi à l'idée toute simple de pouvoir dormir dans un lit, et de manger à sa faim... Des choses si simples, si évidentes... mais que tant de ces petites têtes blondes n'avaient pas... Si il réussissait son concours du barreau, il s'était juré de consacrer une partie de sa fortune aux enfants défavorisés.

Il sortit de ses pensées et éclata de rire en entendant la question du petit garçon. Il lui fit signe de se rapprocher pour lui glisser à l'oreille.

Ne t'inquiètes pas, c'est une gentille sorcière! Elle est seulement dangereuse quand elle se trouve près d'un enfant aux mains et aux oreilles sales!

La vieille dame tendit la main au petit garçon, pour l'inviter à venir la suivre.

Depuis qu'il avait laissé le petit garçon en pension chez la vieille dame, Nathanael ne cessait de réfléchir à ce qu'il allait faire de ce petit garçon. Il ne pouvait pas le remettre à la rue, il s'était attaché à lui, à son sens de la répartie et à ses grands yeux espiègles. Il vint le voir une fois ou deux durant sa convalescence, lui amenant une sucette ou une pâtisserie.

Le temps jouait contre lui, il n'avait pas d'argent pour le loger définitivement chez la vieille dame... Peut-être que Nyme... Il lui écrirait rapidement pour lui demander de l'aide.

William aimait beaucoup quand Nathanael venait le voir parce qu’il lui amenait toujours des sucreries. Par contre, parfois on lui interdisait de les manger parce que ce n’était pas ce qu’il y avait de mieux pour lui. Will finit par passer quelques jours au lit. Il trouvait ça particulièrement ennuyant mais il n’avait pas le choix. De toute façon, il se sentait tellement fatigué qu’il passait la plupart de son temps à dormir. Un soir, il finit par se lever malgré l’interdiction et se promena un peu en essayant de ne pas faire de bruit. Il attrapa ses affaires, vérifiant que la pièce était toujours dans le fond de sa poche. Elle n’y était plus ! C’était impossible…il n’avait pas pu la perdre tout bêtement comme ça. Will retourna tout la maison pour essayer de la retrouver mais il n’y avait rien à faire….

*Je l’ai pas perdu…elle est juste cachée quelque part…il faut que je la retrouve sinon je pourrais pas partir.*