Entrepôts O'Flannagan

Nathanael et Nyme avaient pris la voiture la plus discrète de ce dernier pour se faire emmener au coeur des bas quartiers de Londres, tout en prenant soin de se faire déposer un peu à l'écart, et de convenir d'un endroit où voiture et cocher attendraient en cas de souci.

Puis Nathanael descendit de la berline, et profita du fait de se trouver à l'air frais pour s'allumer une cigarette. Il avait troqué son sobre costume d'étudiant pour un vieux pantalon de toile rapiécé aux genoux, qu'il portait avec une chemise grisâtre aux manches retroussées, le tout accompagné d'une paire de vieilles bretelles. Il avait aux pieds de vieux brodequins usés, et sur le crâne une sorte de casquette en tweed défraîchi. Il faisait pleinement couleur locale.
Accompagné de Nyme, ils marchèrent quelques minutes dans les ruelles plongées dans l'obscurité et le brouillard jusqu'aux abattoirs où leur homme était supposé travailler. Une grande bâtisse en briques rougeâtres, aux lourdes portes de fer coulissantes. De l'extérieur, ils purent voir que l'intérieur était éclairé, mais c'était surtout le bruit, bruit de mugissements ou de bêlements désespérés de bêtes qui savaient leur dernière heure arriver.

Ils firent le tour de la bâtisse, et trouvèrent une petite porte entr'ouverte.

Eho? Y'a quelqu'un?

Nyme avait prit soin de se changer pour paraître plus banal et prit soins de sortir armé cette fois. Ils se firent conduire près de l’abattoir. Il suivit Nathanael de près, sentait un frisson le parcourir en entendant ces animaux. Oui, il était habitué à la mort…mais pas aux actes violents. Tout ce qui lui venait en tête c’était Théodora…qu’est-ce qui lui arriverait s’ils se faisaient tuer tout les deux ?

- Il y a quelque chose là-bas…

Dit-il en voyant une ombre se mouvoir dans la lumière qu’ils avaient aperçu plus tôt. Nyme espérait que ça ne dégénère pas…que l’homme réponde simplement à leurs questions. Car dans ce genre d’endroit il y a beaucoup de lames…et personne ne le remarquera si quelques morceaux de viandes s’ajoutaient. Mais la silhouette semblait plutôt petite, pas comme l’homme qui l’avait attaqué au pub

Nathanael acquiesça suite à l'information de Nyme, en s'approchant de la lumière. Il n'avait pas pour plan de rentrer et de tout défoncer sur son passage. Il allait commencer par être sympa, faire le gentil, et poser quelques questions... Si l'autre n'était pas coopératif, il essaierai de lui forcer un peu la main!

Il s'enfonça plus loin dans cet endroit glauque et surréaliste, surveillant Nyme du coin de l'oeil, et appelant à tue-tête. On ne se méfierait pas de deux types perdus.

Ohé? Sur les quais on a entendu dire que vous auriez ptet' besoin d'bras! Y'a quelqu'un?

Ils avancèrent encore, pour se rapprocher des bruits de bétail, là où se trouverait certainement quelqu'un.

Nyme tentait d’avoir l’air nonchalant, après tout il était sensé être juste quelqu’un qui se cherchait du travail. Mais il était tout de même très nerveux. Ils continuèrent à se rapprocher des cris d’animaux et finirent enfin par croiser un homme qui n’était pas celui qu’ils avaient espérés croiser et qui se retourna en leur demandant ce qu’ils voulaient.

- On a entendu dire que vous cherchiez des gars.

Dit-il simplement en faisant attention à sa façon de parler, se disant qu’il laisserait Nathanael faire les longues phrases pour éviter de ce faire prendre. En faite, il était bien content de ne pas être tombé sur celui qui avait faillit le tuer mais continuait à regarder autour pour voir qui d’autre pouvait être là. Après tout, il était peut-être quelque part, cet homme n’était sûrement pas seul à travailler dans un tel endroit.

L'homme avait l'air d'un simple ouvrier en train de faire une dure besogne. Nathanael, totalement à l'aise, s'avança franchement vers lui, l'air ouvert et amical. Pourvu que le jeu de l'ouvrier en mal de travail fonctionne!
Arrivé près de l'ouvrier, Nathanael l'apostropha.

Eh l'ami, mon camarade et moi on a entendu qu'vous cherchiez d'laide, et on nous a dit d'venir parler à Harry... un type costaud avec des tatouages, qui r'semble à un marin... Vous connaissez l'bonhomme?

Il attendit la réponse de l'homme, tout en surveillant le reste de l'entrepôt du coin de l'oeil... juste au cas où...

Mais le type ouvrit une bouche édentée, aux dents noircies par le tabac à chiquer.

Le type qu'vous cherchez, c'est pas Harry, mais Henry, Henry le cogneur. Il est là-bas, c'lui qui coupe les carcasses.

Nathanael le remercia d'une tape sur l'épaule, puis, d'un petit signe de la tête à l'attention de Nyme, se mit en direction dudit Henry le cogneur.

Henry le cogneur, découpeur de caracasse ? Super….c’était encore plus rassurant. Nyme suivait Nathanael de près, ayant de plus en plus de mal à contrôler sa crainte grandissante alors qu’ils approchaient de l’homme. Il n’arrêtait pas de ce dire qu’il n’était pas fait pour ce genre de chose, qu’il apporterait bien plus de problèmes à son beau-frère que d’aide…mais il ne pouvait tout de même pas se résoudre à le laisser seul. Ils se rendirent donc dans la direction indiqué jusqu’à tombé sur l’homme en question qui, couvert de sang de bête fit reculer Nyme involontairement d’un pas. Il devait avoir l’air de tout un lâche…mais au moins il ne s’était pas enfuit. Ce qui aurait sans doute été très tentant mais au moins il avait une arme et se déjà un peu mieux en le sachant.

- Bien le bonjour, on aurait quelques trucs à vous demander.

Lança-t-il simplement à l’homme quand il l’aperçu. Celui-là n’avait pas changé en tout cas, toujours aussi grand et costaud du genre qui donne l’impression de pouvoir facilement vous broyer le crâne d’une main…

Nathanael non plus n'en menait pas large. Il s'était souvent trouvé dans des situations un peu délicates, mais il se réservait toujours une porte de sortie. Cette fois, non. Puis il se mordit la lèvre en entendant Nyme mettre les deux pieds dans le plat trop vite. Face à une attaque aussi frontale, le gars chercherait peut-être à s'enfuir, ou il risquerait de s'énerver, ce qui n'était pas franchement mieux. Nathanael fit donc taire Nyme d'un regard, avant de reprendre les rênes de la conversation.

Mon camarade a raison l'ami. En fait, on a fait un pari stupide lui et moi, parce qu'un ami à nous, bourré comme un coing, a juré avoir du des gars près d'ici jeter de la bière dans l'eau. Mon camarade et moi on lui a dit qu'il était sur'ment trop bourré pour voir quoi qu'ce soit, et que s'tait sûr'ment du sang de boeuf... Alors, qui a raison? Si vous nous répondez, on vous paie une pinte au troquet du coin!

Il tenta de lui lancer son sourire le plus amical, mais l'énorme masse humaine leva les yeux vers les deux amis, lentement. Le regard chargé de haine qu'il leur lança lui donna froid dans le dos. Et lorsqu'il se mit à parler, c'est d'une voix caverneuse et rauque qu'il leur aboya.

C'est pas vos oignons! Dégagez d'ici où je vous réserve le même sort qu'à ces cochons!

Si l'enjeu n'avait pas été aussi important, il aurait pris ses jambes à son cou sans demander son reste, mais là il ne pouvait pas reculer, il avait trop besoin de cette information. Il tenta une autre approche.

Bon... il est important que nous sachions ce que contenaient ces barils que vous avez vidés dans les puits et les canalisations... Je vous donne une guinée si vous parlez, et je vous promets que personne ne saura que vous nous avez parlé...

Nyme eut l’excellent réflexe de se taire et ce même quand Nathanael raconta une histoire tirée par les cheveux et qui lui semblait très peu crédible. L’homme semblait être de son avis là-dessus, ce que la sympathique menace qui leur fit confirma. Nyme avait un très mauvais pressentiment. L’homme refusa de répondre à Nathanael et se leva complètement et fit un pas vers eux.

- Une guinée, avouons que ce n’est pas beaucoup, vous valez sans doute plus.

À ce moment, il tentait simplement d’éviter le pire et de calmer le colosse. Par précaution, il fourra tout bêtement ses mains dans ses poches pour être certain d’avoir son arme à porté.

- On vous a sans doute bien payé pour ce travail, ou du moins on a dû vous promettre beaucoup d’argent pour votre silence et pourtant vous n’avez rien touché ? Sinon, que feriez-vous encore ici ?

Pour que cette homme donne de l’information, il fallait simplement lui faire comprendre que c’était largement à son avantage et qu’aucune occasion du genre ne se reproduirait.

Nathanael ne put cacher sa surprise en entendant l'argument de Nyme. C'était loin d'être faux! Il recula d'un pas en voyant le colosse se rapprocher d'eux. Là ça devenait sérieux! Surtout que le colosse s'approchait d'eux l'air mauvais, tenant un couteau de boucher long et maculé de sang frais.

Vous en savez trop, bande de fouineurs! Je vais vous faire passer l'envie de mettre votre nez là où vous ne devriez pas!

Il écarta de sa main immense une table qui se trouvait sur son chemin, et s'avança à pas lourds vers eux, en faisant des moulinets avec son arme. Nathanael alla alors se mettre sur son chemin.

Vous vous rendez compte qu'à cause de vous des centaines de personnes sont mortes? Des enfants sans parents, des maris sans leurs femmes?

Nathanael eut juste le temps d'éviter un coup de lame sanglant en faisant un bond en arrière. Les hostilités étaient lancées, ils allaient devoir se battre.

Bon, il avait raison, ça s’annonçait mal ! Il recula alors que Nathanael alla se placer tout juste au mauvais endroit et passa très près de se retrouver en morceaux. C’était maintenant évident que discuter avec cette chose serait impossible. Nyme sorti son pistolet de sa poche, se félicitant intérieurement de l’avoir amené et surtout de l’avoir chargé. Il siffla simplement pour attirer l’attention de l’homme.

- Je vous conseillerais de vous calmer.

Il doutait que ce soit très efficace mais pouvait au moins se réconforter en se disant qu’il savait bien visé et qu’il savait où tirer pour que le colosse s’effondre…quoique le tuer n’aurait pas été très pratique. Nyme ne le quittait pas des yeux, observant son moindre geste, en oubliant presque la présence de son beau-frère à ses côtés. Si au moins l’homme lui avait lancé son couteau par la tête, il aurait pu l’attrapé, en s’entrainant par exemple sur le portrait de son père, il était devenu plutôt habile avec les lames et en plus, l’autre n’aurait plus été armé

Nathanael détourna aussi son attention de l'homme pour la reporter vers Nyme, surpris que quelqu'un d'aussi discret et posé réagisse ainsi. Et ses yeux s'agrandirent de surprise en le voyant, déterminé, une arme à la main. Un arme magnifique en plus, telle qu'il n'en avait jamais vue.
Il recula alors de quelques pas pour se mettre à la hauteur de Nyme, et ne pas risquer de se prendre une balle perdue.

Je... je ne vous savais pas adepte des armes!

En face d'eux, l'homme baissa les bras comme en signe de soumission, et fit un pas vers eux. Sa fureur semblait être retombée, mais il continuait à les regarder d'un air mauvais. Nathanael n'eut que le temps que de tirer Nyme par sa veste, car l'autre venait de donner un coup de pied dans un des établis, qui en reculant les frappa violemment. Les deux hommes retombèrent en arrière, et l'arme de Nyme alla glisser quelques mètres plus loin. Profitant de la débacle, le colosse prit la fuite par la porte arrière des entrepôts, et le bruit de ses pas lourds résonnait dans les docks déserts.

Sonné quelques secondes, Nathanael aida Nyme à se relever.

Vite! On a encore une chance de l'attraper!

Et il quitta l'entrepôt, se dirigeant vers la provenance des bruits.

- Disons que je suis prudent.

Lança-t-il en gardant son arme pointé sur l’homme qui sembla un peu moins menaçant…quoique toujours d’aussi mauvaise humeur. Il n’eut même pas le temps de réagir quand l’établi arriva vers eu. Nyme sentit le sol se dérober sous ses pieds alors que Nathanael l’avait attrapé. Il reçu quand même un solide coup sur la tête et se retrouva au sol. Il n’eut pas réellement conscience que son beau-frère l’aida à se relever et ne vit que sa silhouette s’éloigné alors qu’il s’était mis à courir. Nyme se tint la tête un moment comme pour essayer de se remettre les idées en places. Il regarda autour pour constater qu’il était seul et lâcha un juron.

*Il ne doit pas être très loin quand même*

- Natha…

Le son de sa voix fut soudainement coupé. Il se mit à se débattre quand il avait senti quelqu’un l’attrapé par derrière, le bâillonnant rapidement pour l’empêcher de crier. Là, il était bel et bien seul…et ne venait sûrement pas de se faire un nouvel ami…

La poigne autour du cou de Nyme était phénoménale, et donnait l'impression que d'une seconde à l'autre il aurait pu lui arracher la tête du reste de son corps comme pour un bouchon de champagne. Il le souleva du sol en ricanant. Il empestait le sang, l'alcool et la sueur au point d'en devenir écoeurant. Du coin de l'oeil, il put voir la grande lame ensanglantée se lever pour se poser tout contre sa gorge.

Alors mon ptit monsieur, on fait moins le mariole maintenant!

Il sentit le froid de sa lame se poser contre la peau de sa gorge palpitante.

Pris dans l'excitation de la poursuite, il n'avait pas remarqué qu'il était seul à courir sur les quais déserts. Heureusement son assaillant était lourd et pataud, ce qui faisait qu'il arrivait à tenir le rythme sans problème. Sauf que l'autre avait très bien noté ce détail, et lançait caisses et planches sur son passage pour le ralentir. Dans l'ensemble, il s'en tira sans trop de mal, jusqu'au moment où, sans prévenir, le colosse s'arrêta net, et Nathanael, dans son élan, ne put s'arrêter tout de suite. Lorsque son poursuivant se retourna, il ne put pas éviter la redoutable planche à clous, arrivant à peine à se protéger le visage de ses bras, qu'il se prit de plein fouet. Il chancela, et recula de quelques pas, quelques clous s'étant profondément enfoncés dans sa chair.

Le colosse commença à s'avancer vers lui, toujours aussi impressionnant et énervé, et lui envoya un crochet du droit phénoménal. Nathanael eut juste le temps de se baisser, et en profita pour répondre d'un violent coup de poing dans le ventre du molosse. Mais c'est lui qui dut se retenir de pousser un cri de douleur : autant frapper un mur! Il recula rapidement, le chasseur devenant la proie.

Nathanael se mit alors à courir en sens inverse, retournant vers l'abattoir, avec la montagne de muscles toujours sur ses talons. A chaque instant, il balayait le chemin devant lui pour trouver un éventuel plan de sauvetage. Il accéléra pour mettre un peu plus de distance entre eux, histoire de se donner quelques instants d'avance avant d'arriver au coin du batiment. Il appuya son dos contre le mur de briques froide, reprenant sa respiration tout en attendant que son agresseur arrive.

Les secondes semblèrent durer des heures, avant qu'il n'arrive tout près. C'est l'instant qu'il choisit pour abattre à l'arrière du crâne du colosse la barre de fer qu'il venait de ramasser. C'est avec un soupir de soulagement qu'il le vit s'abattre sur le sol, face en avant.

Rassuré, et son taux d'adrénaline baissant enfin, il se pencha quelques secondes, les mains sur les cuisses, pour retrouver son souffle, avant de se rendre compte d'une chose : Nyme!

Il retourna vers l'abattoir, mais personne. Il se mit alors à appeler, paniqué à l'idée de savoir ce qui aurait pu arriver à son ami.

Nyme resta caché un moment après avoir aperçu l’homme passé avant de sortir de l’eau en remontant sur le quai. Il regarda autour pour vérifier qu’il n’était plus en danger et remarqua un peut de sang sur sa chemise…ses blessures commencèrent à lui faire mal puisqu’il avait enfin le temps de s’en soucier. Bon, il fallait qu’il retrouve Nathanael car il n’avait pas du tout envie d’annoncer à Théodora qu’il était sûrement mort quelque part. Réfléchissant, il décida de revenir là où il l’avait perdu de vu pour essayer de trouver des indices sur l’endroit où il aurait pu aller. Prudemment, il retourna sur ses pas vers l’abattoir et cru à un moment entendre une voix.

- Nathanael ? Nathanael !!

Il avait bien reconnu cette voix, soulagé de le savoir vivant mais ne l’avait toujours pas aperçu, il continua son chemin en suivant le son. Trempé jusqu’aux os, il commençait à avoir froid mais au moins il était en vie.

Nathanael avait entendu les appels de Nyme et se précipita pour lui porter secours. Il ne put retenir un cri de surprise en le voyant arriver dans un tel état.

Mon Dieu Nyme, vous allez bien?

Il ôta sa veste et lui passa sur les épaules, avant de le soutenir pour l'aider à marcher vers leur voiture.


J'ai réussi à assommer la montagne de muscles. Je pense qu'on pourrait essayer de le faire parler une fois qu'il se sera réveillé. On va le ligoter, et il sera bien obligé de parler à un moment ou à un autre. Vous, vous allez rentrer auprès de ma soeur et vous soigner!

Il fut bien content d’enfin le retrouver, il semblait encore vivant alors tout était parfait.

- Je vais bien…je suis tombé sur un de ses amis je crois bien. Il a fallut que je saute à l'eau pour m'en débarrasser.

Nyme se laissa guider, ne comprenant d’abord pas où il l’amenait.

- Mais il est hors de question que je vous laisse seul avec cette chose ! Je n’ai trois fois rien alors je ne pars pas.

Surtout qu’il ne savait pas trop comment il expliquerait tout ça à Théodora. Surtout que là, il était déterminé à ce qu’elle ne sache rien de cette histoire d’épidémie déclenchée car c’était véritablement trop dangereux et qu’il voulait la protéger de ce genre de choses.

Nathanael examinait toujours Nyme des pieds à la tête, s'attendant à ce que ce dernier chancelle d'une seconde à l'autre. Il saignait, même si ce n'était pas grand chose.
Devant l'assurance de Nyme, Nathanael le ramena aux abords de l'entrepôt et lui désigna le colosse, toujours effondré sur le sol. Ils ne furent pas moins de deux pour le traîner à l'intérieur, et lui lier les pieds et les mains avant de l'asseoir sur une chaise.

Puis, Nathanael entreprit de réveiller le colosse à coups de gifles non retenues. Au bout de quelques minutes à ce régime, la montagne de muscles ouvrit les yeux en grognant. Mais son regard se teinta d'inquiétude lorsqu'il sentit ses mouvements entravés.
Nathanael se plaça alors face à lui, la mine ravie.

Alors... on fait moins le malin! Maintenant tu vas parler, parce que sinon, tu vois tout ton attirail pour découper les carcasses? Eh ben c'est sur la tienne que je vais les utiliser... parle!

Pendant que Nathanael parlait au colosse, Nyme enlevait les quelques morceaux de métal qu’il avait reçu. Ce ne fut pas trop compliqué puisque ce n’était que superficiel. Il se mit ensuite à examiner les différents outils qu’ils avaient à leur porté.

Le colosse regardait Nathanael, un peu inquiet quand même puisqu’il se retrouvait en mauvaise posture. Il tenta de tirer sur ses liens pour les défaire et les casser mais sans succès. Nyme lança alors quelque chose qui finit par le convaincre que ces deux là ne plaisantaient pas.

- Si j’étais vous je parlerais, à moins de vouloir un petit cours d’anatomie.

L’homme grogna et baissa la tête un instant.

- Y va me tuer…

C’est vrai, si ce n’était pas ces deux là qui l’achevaient ça serait ce drôle de type qui lui avait donné de l’argent pour se débarrasser de quelques barils.

Nathanael s'étonnait de plus en plus du courage et du sang froid éprouvés par son beau-frère. S'il lui avait un peu délicat et mystérieux, il avait fait preuve devant lui de bien des qualités qu'il n'aurait pas soupçonnées. Même lui avait eu la chair de poule en entendant la dernière menace de son partenaire, aussi tenta-t-il de jouer sur la corde sensible.



Peut-être... mais mon ami que tu vois là, lui, c'est le tueur de Londres, le vrai... il manie les couteaux comme personne. Si tu ne parles pas, la mort que te réserve ce patron sera un paradis comparé à ce qu'il risque de te faire subir. Une seule chose est sûre, ça sera long, et douloureux. Il adore torturer des gens des heures avant de les tuer... Alors, qu'est-ce que t'en dis?

Le colosse sembla réfléchir à toute allure, une sueur froide perlant sur son front luisant. Puis, le souffle court, il lança dans un souffle.



C'est bon... c'est bon... C'est un homme qui était enroulé dans son manteau, sous une capuche...je n'ai pas vu son visage, j'vous le jure!

Nyme n’appréciait pas particulièrement de se faire accuser d’être un meurtrier. Surtout qu’il continuait à craindre que la police l’arrête mais ne dit rien, se contentant de garder son sang froid pour ne rien gâcher alors que l’homme se mit à parler.

- Il manque un peu de détails, où est-ce que vous l’avez rencontré ?

Tenant un long couteau, il s’approcha un peu. Autant jouer le jeu…en espérant que ça n’aille pas trop loin car Nyme n’aimait pas ce côté qu’il était capable d’avoir et avait toujours tout fait pour éviter d’y faire face. C’était d’ailleurs pour ça qu’il n’avait pas poursuivit ses études pour devenir chirurgien et tentait toujours d’éviter les opérations.

- C’est long, je ne suis pas très patient vous savez.

Il contourna l’homme pour se retrouver dans son dos afin que celui-ci n’ait aucune idée de ce qu’il pouvait être en train de faire, afin de l’effrayer un peu plus.

Le regard de l'homme alla sans s'arrêter de l'un à l'autre avec inquiétude. La menace semblait faire de l'effet, le bonhomme semblait littéralement terrorisé.
Nathanael prit alors deux couteaux qu'il frotta lentement l'un contre l'autre avec un sourire malsain. L'homme sembla craquer.

Je... il y avait une voiture qui l'attendait!

Le sourire de Nathanael s'agrandit, alors qu'il s'approcha avec les deux lames.

Mais encore?

Sur... sur la porte il... il y avait des dessins... je... un... un serpent et deux lettres... un... un M et un... et un P, c'est ça! Laissez-moi partir maintenant!

D'un signe de tête, Nathanael fit signe à Nyme de trancher les liens du boucher. Il semblait avoir dit tout ce qu'il savait.